21e FOIRE INTERNATIONALE DU LIVRE CUBA 2012

Une mosaïque de livres, d’auteurs et de lecteurs

par Mireya Castañeda

Abel Prieto, ministre de la Culture, a remis le diplôme du Prix national de littérature à Nersys Felipe.
Ce qui est certain, c’est qu’une fois le programme en main, le plaisir se complique car il s’agit de décider quel livre choisir parmi les dizaines de présentations, les rencontres avec les auteurs, les conférences, et les expositions, les concerts et les projections de films. Une vraie mosaïque culturelle !
La Foire est le meilleur moment pour la remise des prix les plus importants, comme le prix national de Littérature 2011, attribué à Nersys Felipe, auteure d’inoubliables livres pour la jeunesse, dont Cuentos de Guane, prix Casa de las Américas 1975.
Comme cadeau aux enfants, la maison d’édition Abril publiait dans un tirage de luxe Tilin de Oro, dont les personnages magiques, de rêves, les histoires et les légendes, ont été mis en scène à l’occasion d’une fête enfantine à la Casa de l’Alba culturelle.
L’écrivain mexicain Serge Pitol (1933) a reçu le prix international Dulce Maria Loynaz, décerné par l’Union des écrivains et des artistes de Cuba (UNEAC).
Auteur de romans, d’essais, de contes et de monographies, Serge Pitol a obtenu en 1999 le prix Juan Rulfo, et en 2005 le prix Cervantes. Cette année, Serge Pitol présentait El viaje (Le voyage), un de ses titres les plus importants.

Un moment privilégié pour les enfants.
 
La littérature de jeunesse, un secteur privilégié à Cuba, a accueilli un autre invité de choix: l’écrivain italo-espagnol Carlo Frabetti qui a reçu des mains du poète Miguel Barnet, président de l’UNEAC, le prix international Dora Alonso, à la salle Villena de cette institution. Carlo Frabetti reçoit cette récompense largement méritée pour la première fois « pour sa contribution aux lecteurs, surtout aux enfants et aux adolescents, pour lesquels il a donné ses droits d’auteur afin que ses œuvres puissent être largement publiées dans l’île ». Dans ses paroles de remerciements, l’auteur de la saga du nain Ulrico, de Malditas matematicas (Maudites mathématiques), de Alicia en el pais de los numeros (Alice au pays des chiffres), de El cuervo dijo nunca mas (Le corbeau a dit jamais plus), de El vampiro vegetariano (Le vampire végétarien) ou de Calvina, a affirmé : « Ce prix, outre la surprise, est l’apogée d’une idylle qui dure depuis dix ans avec mes lectrices et mes lecteurs cubains, surtout les jeunes ; quand je viens à Cuba, on dit que je le fais de façon désintéressée alors que c’est tout le contraire; je suis porté par un intérêt majeur : la rencontre de la plus grande espérance du monde. Quoi que je fasse pour Cuba, ce sera toujours une infime partie de ce que Cuba a fait et continue de faire pour moi. »

Carlo Frabetti s’est entretenu brièvement avec le journal Granma.

Carlo Frabetti : « Respecter l’intelligence
et l’autonomie de l’enfant. »
 
Quel livre présentez-vous pour cette occasion ? La magia mas poderosa y otras aventuras de Ulrico (La magie la plus puissante et autres aventures d’Ulrich, une compilation de quatre ouvrages dont le protagoniste est le minuscule personnage, qui inclut l’œuvre qui donne son titre au volume, plus Ulrico y las puertas que hablan, (Ulrich et les portes qui parlent) Ulrico y la llave de oro (Ulrich et la clé d’or) et Ulrico y la flecha de cristal (Ulrich et la flèche de verre), déjà publiés à Cuba, mais qu’on ne trouvait plus en librairie, car ici les livres s’épuisent rapidement, ce qui est merveilleux… »
Selon vous, quelles sont les caractéristiques de la littérature de jeunesse ? Elle doit principalement respecter l’intelligence et l’autonomie de l’enfant. On ne doit ni le manipuler ni l’endoctriner ; il faut stimuler son imagination et sa capacité de réflexion.
Comment s’adresser à l’enfant ? Il faut tenir compte que ce sont des personnes en formation qui ne dispose peut-être pas encore des mêmes ressources rhétoriques, mais c’est la seule chose dont on doit tenir compte. Simplement, ils ne sont peut-être pas encore capables de capter l’ironie ou le double sens, mais pour le reste on ne doit pas sous-estimer leur intelligence. "
Qu’écrivez en ce moment ? Je suis toujours en train d’écrire. Je viens de publier un livre : Maldita fisica (Maudite physique), qui va également sortir à Cuba, le parallèle en quelque sorte de Malditas matematicas qui a été très bien accueilli ici, et je viens de démarrer un nouveau projet, mais je ne vous en dirai pas plus.
Vos auteurs cubains préférés ? Principalement José Marti, qui est un maître, une référence pour tous et qui n’est pas assez connu en Europe, et Dora Alonso (1910-2001) évidemment. C’est pourquoi je suis tellement honoré de recevoir un prix qui porte son nom.

Ignacio Ramonet reçoit le diplôme de docteur honoris causa des mains de Gustavo Cobreiro, recteur de l’Université de La Havane.
L’amphithéâtre de l’Université de La Havane a été l’espace propice pour remettre le titre de Docteur honoris causa en sciences de la communication à Ignacio Ramonet, chercheur et journaliste espagnol. Gustavo Cobreiro, recteur de l’Université, a remis cette haute distinction à l’auteur d’œuvres telles que Fidel Castro : Biographie à deux voix, Propagandes silencieuses, La tyrannie de la communication. Ramonet était présent à la Foire pour présenter son dernier livre L’Explosion du journalisme. Des médias de masse à la masse de médias (Éditions José Marti), à la salle José Antonio Portuondo de la Forteresse.
À la salle Nicolas Guillen de la forteresse, alors que cette année la Foire était dédiée aux cultures des peuples de la Caraïbe, Nancy Morejon, prix national de Littérature, une voix indispensable de la littérature contemporaine de la région, a reçu le prix Notre Caribe, décerné par la Chaire d’Études de la Caraïbe de l’Université de La Havane. Dans ses paroles de remerciements, Nancy Morejon a évoqué Nicolas Guillen, le poète national, comme le référent éternel, et elle a abordé la question de la transculturation et du métissage dans la Grande Caraïbe.

MUSIQUE, BALLET, THÉÂTRE ET CINÉMA CUBAIN

Une des entrées de San Carlos de
La Cabaña, rebaptisée à juste titre
« Forteresse des livres ».
 
La musique tenant une place essentielle dans la culture cubaine, plusieurs titres ont été présentés à la Foire, dont Los Reyes de la salsa (Les rois de la salsa), publié par les éditions José Marti, de notre collaborateur habituel sur le sujet, le chroniqueur Rafael Lam.
La synthèse : Il s’agit d’un livre de référence sur les origines de la musique salsa et de ses principaux interprètes à Cuba comme à l’étranger. Une histoire de la musique populaire cubaine au 20e siècle et l’apparition du mot « salsa » au début du siècle. Le titre, présenté à la salle Alejo Carpentier de la Cabaña par le chanteur et directeur de groupe Moisés Valle, « Yumuri », inclut des interviews, de nombreux renseignements biographiques sur des groupes salsa et des chanteurs, aussi bien à Cuba qu’à l’étranger, avec des figures latino-américaines connues, telles que Tito Puente, Héctor Lavoe, Andy Montañéz, Cheo Feliciano et Gilberto Santa Rosa.
Vous utilisez le terme salsa ? Je suis remonté jusqu’à Miguel Matamoros (1894-1971), et je regroupe les musiciens sous le nom de Los reyes de la salsa, car on a coutume de dire que la musique cubaine a beaucoup de « salsa » : à l’époque déjà Ignacio Piñeiro (1888-1969) chantait échale salsita !, de même que Benny Moré (1919-1963) terminait ses concerts en disant : Se acabo la salsa ! La salsa tire ses origines de la musique cubaine. Le concept de la salsa, son format, sa structure viennent de la musique cubaine.
Des précédents à ce livre ? À Cuba, on n’a jamais rien écrit sur la musique dansante. Elle est abandonnée, oubliée et méconnue, ce qui est surprenant parce que c’est le genre le plus important pour tous les peuples. La musique de danse est le miroir d’un pays, et surtout de Cuba. On a écrit des livres sur la salsa à l’étranger, en prenant des références à Cuba, mais ils ne sont pas cubains.
Une autre chercheuse sur la musique cubaine, la musicologue Alicia Valdés a présenté à la salle Villena une édition amplifiée du Dictionnaire des femmes célèbres de la musique cubaine (Éditions Oriente). Le volume rassemble l’histoire d’environ 400 compositrices, chanteuses, instrumentistes, chercheuses et pédagogues.
La mythique Alicia Alonso a inscrit Cuba au Parnasse du ballet universel. Aujourd’hui, c’est l’historien du Ballet national de Cuba, Miguel Cabrera, qui offre un nouveau livre sur le sujet, présenté au Centre Dulce Maria Loynaz, un des sièges de la Foire. El Ballet en Cuba. Apuntes historicos (Le ballet à Cuba. Notes historiques) (Editions Cupulas, de l’Institut supérieur d’Art). Un volume de onze chapitres qui inclut une centaine de photos de grande valeur historique.
Par ailleurs, à la salle Lezama Lima s’est tenu un colloque sur l’écrivain Virgilio Piñera et sa relation avec la danse, dirigé par Pedro Simon, directeur des éditions Cuba en el Ballet et le Musée national de la Danse, à l’occasion du centenaire de la naissance de l’écrivain.
Tandis qu’à la salle Nicolas Guillen, avait lieu la rencontre tant attendue consacrée au dramaturge et écrivain, Un poco de Piñera, qui fut présidée par Anton Arrufat, prix national de Littérature.
Au terme de cet hommage à un des pères fondateurs du théâtre cubain contemporain (Aire frio, Electra Garrigo), a suivi la présentation de ses romans : La carne de René (La chair de René), Pequeñas maniobras (Petites manœuvres), et Presiones y diamantes (Pressions et diamants), et également Orbita Piñera ; Virgilio Piñera en persona, et Virgilio Piñera de vuelta y vuelta, une compilation de ses correspondances publiée aux éditions Union.
Les éditions ICAIC se sont considérablement développées. Elles présentaient 16 nouveautés, notamment le livre du journaliste Orlando Castellanos Yo tambien amo el cine (Moi aussi, j’aime le cinéma), des interviews de onze réalisateurs, sélectionnées par Virgen Gutierrez ; El cine, décima musa (Le cinéma, la dixième muse) d’Alejo Carpentier où sont réunis pour la première fois les textes de Carpentier sur le cinéma, des comptes rendus, des critiques, des commentaires publiés dans la presse cubaine, française et vénézuélienne, et Las trampas del Oficio. Apuntes sobre cine y sociedad (Les pièges du métier. Notes sur le cinéma et la société), d’Ambrosio Fornet, une réflexion sur le Septième art comme expérience personnelle et collective.

ANGOLA 2013

La ministre angolaise de la Culture, en compagnie de Zuleica Romay, présidente de l’Institut du livre, lors de l’annonce que l’Angola sera le prochain invité d’honneur de la Foire en 2013.
« La 22e Foire internationale du livre sera consacrée à l’ancienne et grande culture angolaise », a annoncé en conférence de presse Zuleica Romay, présidente de l’Institut cubain du livre.
« L’année prochaine sera le moment opportun pour reconstituer et récupérer certains aspects de l’histoire commune entre Cuba et l’Angola, dont l’histoire est très ancienne et remonte au trafic d’esclaves d’un continent à l’autre. Cependant, aucune des deux nations ne connaît la dimension de ces racines, car il nous faut approfondir les liens communs qui nous unissent », a déclaré Rosa Cruz da Silva, ministre angolaise de la Culture.
« Sans doute, 2013 sera une nouvelle occasion de rappeler les racines africaines qui irriguent notre culture, dans toute leur diversité, dans toute leur richesse », a souligné Abel Prieto, ministre cubain de la Culture.
La 21e Foire internationale du livre Cuba 2012 a fermé ses portes à La Havane le 19 février. Elle se poursuit jusqu’au 5 mars dans toute l’île. Plus de 270 000 personnes ont visité les différents espaces de la Foire, et 600 000 exemplaires ont été vendus.

Source : Granma International
www.granma.cu/frances/culturelles/24febre-Une%20mosaique.html

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