Cuba commémore l’invasion de la Baie des Cochons

Quelques jours à peine après une rencontre historique entre Raul Castro et Barack Obama au Panama, Cuba commémore vendredi l’invasion ratée de la Baie des Cochons en 1961, épisode qui avait entériné la rupture entre les deux pays.
Comme chaque 17 avril, une salve de canons doit être tirée des murailles de la caserne La Cabaña, qui domine l’entrée dans la baie de La Havane.
Mais cette fois l’anniversaire revêt une dimension inédite, alors que les deux pays sont engagés depuis décembre dans un rapprochement devant mettre fin à 54 ans de conflits et de tensions, dont cette invasion dans le sud de l’ile a été un des points de départ.
Le 15 avril 1961, des avions américains peints aux couleurs cubaines bombardent des bases aériennes de La Havane et de Santiago, détruisant une grande partie de l’aviation cubaine en violation des conventions internationales.
Dans la foulée, Fidel Castro proclame le caractère socialiste de sa Révolution, confirmant les craintes du gouvernement américain.
Et le lendemain, quelque 1’400 anti-castristes soutenus par Washington débarquent dans la baie des Cochons, sur la plage « Giron », à 250 km au sud-est de la capitale cubaine.
Mais l’appui populaire espéré ne vient pas et les quelques avions cubains encore en état de voler donnent à l’armée cubaine un avantage décisif.
Au terme de deux jours d’âpres combats dans cette région marécageuse qui se transforme en enfer pour les assaillants, ces derniers jettent l’éponge et 1’189 d’entre eux se rendent aux soldats cubains.
Les affrontements auront fait 161 morts côté armée cubaine et 107 côté assaillants. Cinq anti-castristes seront fusillés, neuf condamnés à 30 ans de prison, et les autres libérés en échange de 53 millions de dollars d’aliments et médicaments concédés par Washington.
Trois mois et demi avant l’invasion, Dwight Eisenhower avait rompu les relations diplomatiques avec Cuba et demandé à la CIA de préparer cette invasion.
Son successeur John Kennedy, entré en fonctions peu après, donna son feu vert à l’opération mais refusa d’impliquer directement l’armée, privant les assaillants d’appuis aérien et maritime.
Après cet épisode, Fidel Castro devient un véritable héros sur l’ile, un David socialiste qui fera du combat contre le Goliath impérialiste son cheval de bataille.
Moins d’un an plus tard, J.F. Kennedy décréta l’embargo contre Cuba, menant à la crise des missiles qui mit le monde au bord d’un conflit atomique.
Cette année, les commémorations se feront plus discrètes, cinq jours après un Sommet des Amériques de Panama marqué par un entretien aussi historique que cordial entre les présidents Castro et Obama, qui s’est montré en faveur du retrait de Cuba de la liste américaine des États soutenant le terrorisme.
Outre les traditionnels coups de canon de La Cabaña, des cérémonies sont prévues à Playa Giron, où un petit musée exhibe avions, chars et canons ayant participé à ce que Fidel Castro avait qualifié de « première défaite impérialiste en Amérique latine ».
Il n’y a pas si longtemps, cette victoire qui figure en bonne place dans les manuels scolaires cubains était célébrée en grande pompe, notamment avec de grands défilés militaires et civils comme lors du 50e anniversaire, en 2011.
Mais le contexte est plus apaisé vis-à-vis des États-Unis et le discours plus conciliant depuis que Raul Castro a succédé à son frère à partir de 2006.
Signe des temps, la Baie des Cochons est aujourd’hui connue pour être un pôle touristique en plein essor qui tente d’attirer l’investissement étranger.
Un tour-opérateur cubain y organise notamment des concours photo autour de la faune aviaire. Et récemment ce sont deux groupes de photographes amateurs américains et… russes qui s’y sont affrontés.
Cette baie est située dans la région de la Cienaga de Zapata, une vaste région de forêts et de mangrove déclarée réserve de biosphère par l’Unesco. Connue pour ses crocodiles et la richesse de son écosystème, elle constitue la plus grande zone humide des Caraïbes.
Source : L’Obs / AFP

Publié dans Actuel, Cuba

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