Un Lotois fait école à Cuba

Il ne vous aura pas échappé que Cuba fait la Une de l’actualité ces derniers temps, avec d’une part les velléités d’ouverture du gouvernement cubain vers le monde occidental et les Etats-Unis en particulier et d’autre part le tout récent voyage du président François Hollande à Cuba au cours duquel il a rencontré Fidel Castro. Un ostéopathe lotois, Joël Trolez, exerçant sa profession à Limogne en Quercy n’a pas attendu ces soubresauts de l’actualité autour de Cuba, puisque depuis 2010, il est confronté à la réalité de ce pays. M. Trolez évoque avec nous, plus en détail, les activités qu’il conduit à Cuba.

M. Trolez, dites-nous ce qui vous a conduit à aller professer votre activité d’ostéopathe à Cuba ?

Les circonstances qui m’ont amené à Cuba sont assez inédites. Au début de ma carrière professionnelle, alors que j’exerçais la profession de Kiné, à Courchevel, j’ai fait la connaissance d’une personne qui est devenue mon ami. De nombreuses années passent et en 2009, mon copain, travaillant comme Tour Opérator, séjourne à Cuba. Bloqué du dos, souffrant le martyre pendant plus de 15 jours, ayant sans succès fait appel à des médecins et kinés cubains, il a fini par m’envoyer un courriel dans lequel il me lance un véritable SOS. Ne trouvant pas de remèdes à ses maux, il me demande de venir le soigner à Cuba « Je te paye le billet d’avion pour que tu me remettes droit » me précisait-il. J’ai gardé son courriel en souvenir. N’hésitant pas une seconde, je suis parti pour Cuba afin d’essayer de soulager mon ami.

Et alors, une fois à Cuba avez-vous guéri votre ami ?

Arrivé à La Havane, j’ai effectivement « remis sur pied » mon ami au bout de 4 à 5 jours. L’ayant soulagé, il a pu reprendre son activité professionnelle. C’est à l’issue de ce séjour que des personnes de l’Institut des Sports Cubains m’ont contacté et m’ont demandé si je ne voulais pas assurer une formation dans leur Institut.

C’est donc sur la base de vos compétences que vous avez été contacté par ces praticiens de l’Institut des Sports ?

Je n’expliquerais pas les choses aussi simplement car je crois qu’il faut savoir rester modeste dans la vie. Alors bien sûr, la « remise sur pied » de mon ami a été probablement un facteur favorable, mais je crois surtout que j’ai bénéficié en quelque sorte de l’embargo dont souffre Cuba depuis plusieurs décennies. Il faut savoir qu’à Cuba, les médicaments sont rares, là-bas on fait des médicaments pour soigner et non pas pour faire de l’argent contrairement à ce qui se passe dans certains pays… Devant cette pénurie de médicaments les autorités cubaines ont fait le choix de développer d’autres médecines comme la médecine traditionnelle, l’acupuncture ou l’ostéopathie. Je crois que ces orientations sont les raisons de l’intérêt que m’ont porté ces praticiens cubains. La médecine cubaine demeure une des meilleures du monde : espérance de vie, faible mortalité infantile.

Comment se déroulent, depuis l’épisode de la guérison de votre ami, vos séjours à Cuba ?

Ayant déjà été enseignant en France, j’ai donc accepté d’assurer une formation d’ostéopathe à l’Institut des Sports. Depuis 2010, je me rends donc 4 fois par an à Cuba pour une semaine d’enseignement. J’ai formé 18 élèves depuis le début. Aujourd’hui, 4 des élèves que j’ai eus, sont devenus des moniteurs pour de nouveaux élèves. Au début, ma formation intervenait dans le cadre de l’Institut des Sports, désormais elle s’exerce dans un cadre hospitalier et elle est reconnue par le Ministère de la Santé Cubaine. En mars 2015, une nouvelle étape a été franchie avec la création d’une école d’ostéopathie intitulée la Sociedad Francesa de Medicina Osteopática Cuba-Osteo (N.D.L.R. : pour plus de renseignements consulter le site la Medicina de Rehabilitacion Cubana à l’adresse suivantehttp://articulos.sld.cu/rehabilitacion/)

Quel est le but de cette école ?

Comme le disent mes amis cubains, « buscamos a incentivar y desarollar esta disciplina de medicina osteopática sin fines de lucro », en français cela veut dire que nous voulons stimuler et développer notre discipline d’ostéopathie et ceci à des fins non lucratives. Je ne fais pas ça pour m’enrichir comme je viens de le dire, il s’agit pour moi de développer avec mes amis cubains la pratique de soins ostéopathiques et de former des praticiens. D’ailleurs, je voudrais profiter du courant actuel positif autour de ce pays pour demander aux acteurs politiques européens et français un soutien tangible pour développer ce type de coopération avec ce pays. J’ai rencontré tout récemment un élu départemental pour lui exposer ma requête.

Au cours de vos séjours à Cuba, vous êtes confronté à la réalité économique, sociale et politique de ce pays. On dit en France, beaucoup de choses sur ce pays, des choses positives comme l’excellent système de santé ou le niveau culturel moyen élevé de la population et des choses négatives comme la privation de liberté ou la corruption résultant de l’embargo. Votre avis ?

Certaines des idées reçues attribuées à ce pays me désolent. Cuba est un pays à part, un pays formidable, la population est dynamique, les relations de concurrence n’existent pas et ceci modifie et bonifie, je le crois, les relations humaines. Par ailleurs, Cuba a depuis longtemps fait de la protection de l’environnement une priorité nationale. Cuba est la seule nation au monde à avoir atteint un développement durable (engagement à améliorer les qualités de vie humaine tout en vivant dans les limites de la capacité de charges des écosystèmes qui nous font vivre) ; ni le monde dans son ensemble, ni aucun pays pris séparément n’y sont arrivés, seul Cuba y parvient. Ce petit pays sous développé a démontré qu’en mettant la science et la technologie au service de l’être humain et de l’environnement, il était possible de préserver la nature. Pour conclure, les Cubains sont animés par un esprit de partage et de fraternité ancré dans leurs gènes de par leur histoire. Le monde a beaucoup à apprendre de Cuba.

Source : La Vie Quercynoise.fr  Roland Puech

Publié dans Actuel, Cuba, International

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